La France continue de faire le grand écart entre Alger, Rabat et Paris. Sous Emmanuel Macron, c’est la détestation de la France à tous les étages en Afrique.
La diplomatie française est à la peine en Afrique. D’abord au nord du continent, les trois pays font monter les enchères. Au Sahel, hormis le Tchad et le Niger, la France décroche dans tous les pays. Pire : des manifestations sont organisées contre sa présence. Si bien qu’Emmanuel Macron est obligé de pousser plus loin en Afrique comme au Congo pour essayer de reprendre pied sur ce continent qui lui échappe de plus en plus.
Le périple du président français en Afrique valait-il la peine à l’heure du grand désaveu ? Certainement que non. Surtout si l’on sait qu’en haut lieu la « Françafrique » est une réalité même si dans les discours depuis Hollande les autorités françaises rabattent les oreilles des Africains sur la fin de ces fameux réseaux hérités de Jacques Foccart. Et pourtant la donne a bien changé. Les Africains veulent vivre souverains.
Alors que les deux capitales d’Afrique du Nord n’ont pas d’ambassadeurs français, et vice-versa pour Paris, la ministre des Affaires étrangères française s’est employée à défendre la politique de la France au Maghreb lors d’une audition mardi devant la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale.
« Au-delà des moments qui peuvent être des moments d’incompréhensions de votre part de la relation avec l’Algérie, nous devons tous travailler chacun à notre place pour que cette relation qui est une relation de long terme serve les deux côtés de la Méditerranée », a ainsi réagi Catherine Colonna.
Alger a récemment rappelé son ambassadeur après le rapatriement en France de la militante franco-algérienne Amira Bouraoui, alors qu’elle était en situation irrégulière en Tunisie.
Mais Paris a signalé sa volonté d’approfondir ses relations avec Alger et, ce malgré les crispations que cela suscite chez son voisin marocain. L’hebdomadaire Jeune afrique a annoncé que l’Algérie allait bientôt renvoyer son ambassadeur à Paris. Ce qui constituera le début de la fin d’une brouille diplomatique qui aura pourri les relations entre les deux pays pendant deux mois encore. La question de la visite de Tebboune à Paris, annoncée pour mai, reste toutefois posée. Cette visite pourrait être dans le symbole car elle serait une occasion pour Emmanuel Macron de faire un geste par exemple sur la colonisation.
Impasse marocaine
En dépit des assurances de Catherine Colonna, les relations entre Rabat et Paris ne sont pas au beau fixe aussi. Le Maroc ne rate pas une occasion de montrer son courroux suite au rapprochement entre la France et l’Algérie.
Plusieurs députés ont interpellé Catherine Colonna sur des propos publiés récemment par Jeune Afrique d’une source officielle au sein du gouvernement marocain affirmant que « les relations ne sont ni amicales ni bonnes, pas plus entre les deux gouvernements qu’entre le Palais royal et l’Élysée », la cheffe de la diplomatie a souligné qu’il s’agissait de propos d’une source anonyme.
« Si nous avons lu des déclarations désagréables dans la presse, elles sont de sources anonymes et n’appellent à ce titre pas de commentaires particuliers », a-t-elle balayé. En matière de cécité, on a connu mieux !
La diplomatie des visas
La France avait réduit drastiquement le nombre de visas pour les trois pays d’Afrique du Nord. Ce qui a suscité une levée de boucliers des autorités et poussé Paris à rétropédaler quelques mois plus tard. Catherine Colonna a déclaré aux députés qu’elle s’attachait à « pratiquer l’apaisement », preuve étant qu’elle s’était elle-même rendue au Maroc en décembre, ce qui avait permis de reprendre « des relations consulaires ».
Lors de son déplacement, elle avait en effet annoncé la fin de la politique de restrictions d’octroi des visas qui avait cristallisé les tensions diplomatiques. Une décision similaire avait ensuite été prise pour l’Algérie et la Tunisie.
« Je souhaite continuer pour ma part de pratiquer le même apaisement », a-t-elle ajouté.
Elle n’a pas fait mention de la visite d’Emmanuel Macron au Maroc qui était envisagée pour le premier trimestre de cette année et qui ne semble plus d’actualité.
Toutefois, elle a souligné qu’elle restait « sur les échanges » qu’elle avait eus avec ses homologues marocains en décembre dernier au cours desquels Paris et Rabat avaient signalé leur volonté de refonder en profondeur leur relation et avaient évoqué cette potentielle visite.
Alors l’implantation de plus en plus agressive de la Russie, la Chine et la Turquie ne semble pas servir de leçon aux autorités françaises qui continuent à se conduire comme au temps béni de la Françafrique. Pour autant, pour les pays africains, il ne s’agit pas de s’affranchir des influences d’un pays pour en retomber dans celle d’un autre. Ce qui n’est malheureusement pas à exclure.
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