Entre l’Algérie et la France, les événements banals du quotidien rappellent la guerre. Ceux qui ont participé à cette guerre, qui a pris fin en 1962, prennent de l’âge et disparaissent, emportant avec eux des pans de cette histoire passionnelle. C’est le cas du général François Meyer, décédé le samedi 11 juin. Pour les Français, ce général est celui qui a sauvé plusieurs centaines de harkis. Pour les Algériens, il reste cet ennemi qui a participé à une guerre où tout a été utilisé pour faire plier un peuple qui se battait pour retrouver sa liberté.
L’information a été annoncée par Emmanuel Macron. Le président français a rappelé que cet officier avait pris fait et cause pour la défense des harkis. À la fin de cette Guerre d’Algérie (1954-1962), rappelle le président dans un communiqué d’hommage, François Meyer avait décidé « d’exfiltrer par ses propres moyens ses hommes et leurs familles vers la métropole, en contradiction flagrante avec les directives officielles ». Le général de l’armée française avait fait embarquer 350 personnes vers la France pour leur éviter « les exactions » des Algériens, selon la version française de l’histoire.
« Après avoir sauvé ses hommes et leurs familles », écrit le président français dans sa lettre hommage, « il consacre son énergie à chercher des villages français pour les accueillir, qu’il trouve finalement en Lozère. Les harkis qui s’y installent deviennent agriculteurs. Pendant des années, il y passe toutes ses permissions et déploie des efforts inlassables pour aider à leur intégration. Il s’emploie aussi à entretenir la mémoire de ses anciens compagnons d’armes, dans la presse et dans des colloques, publiant un livre à leur sujet en 2005 ».
Le général Meyer a soutenu que l’action de l’armée française en Algérie fut d’abord sa lutte contre toutes les formes de torture
Cependant, pour les Algériens, ce général est celui qui a participé à une guerre contre tout un peuple. Il fait partie des signataires en 2002 d’un manifeste affirmant que « ce qui a caractérisé l’action de l’armée française en Algérie, ce fut d’abord sa lutte contre toutes les formes de torture ».
Ce texte est la préface d’un Livre blanc de l’armée française en Algérie qui s’en prend violemment, comme au temps de cette guerre, à la soi-disant campagne de « désinformation » contre l’armée. Ce manifeste conteste que des instances universitaires aient admis à la soutenance la thèse de l’historienne Raphaëlle Branche, « L’armée et la torture dans la guerre d’Algérie », primée à l’Institut politique de Paris par la mention très bien et les félicitations d’un jury unanime et parfaitement qualifié.
Pour les Algériens, le général François Meyer fait partie également de ceux qui ont glorifié la colonisation. Il fait partie des négationnistes des atrocités commises par les Français en Algérie tout au long de leur présence.
Observ’Algérie