Nous savons qu’il existe des effets secondaires potentiellement graves au vaccin ARNm contre le COVID 19 tels que des myocardites.
Dans les données rétrospectives la principale complication cardiaque est la myocardite, qui reste rare avec une incidence de 0.0035 % et touche principalement les hommes jeunes de moins de 18 ans. Néanmoins il existe un biais de sélection car seuls les cas graves, nécessitant une hospitalisation sont reportés.
L’incidence réelle des lésions myocardiques serait donc probablement beaucoup plus élevée dans la population générale. De plus, du fait de la nécessité de doses répétées et du grand nombre de personnes à vacciner, même rare cette complication n’est pas anecdotique. Cette étude avait pour but d’évaluer l’incidence réelle des lésions myocardiques lors des vaccinations par un vaccin ARNm dans le COVID 19 de manière prospective et d’évaluer d’éventuelles mesures de prévention et de protection à appliquer chez les patients présentant ces lésions myocardiques asymptomatiques.
Cette étude était prospective monocentrique avec un bras contrôle. La population étudiée était composée d’employés du CHU de Basel en Suisse, ayant reçu une dose de vaccin ARNm Pfizer-BioNTech ou Moderna.
Le critère de jugement principal était la survenue d’une lésion myocardique, définie par une élévation de la troponinémie au-dessus de la norme, dosée à J3 post vaccination.
En cas d’élévation, un nouveau dosage était réalisé à J4 avec possibilité de réaliser de plus amples explorations cardiologiques. De plus, les patients présentant des lésions myocardiques étaient contre-indiqués à l’effort, et ce jusqu’à la décroissance de la troponinémie. Dans tous les cas le suivi était poursuivi jusqu’à J30.
Les critères de jugement secondaires étaient la comparaison de la population totale avec des patients ayant été admis pour douleur thoracique sans qu’aucune cause cardiaque ne soit retrouvée. L’appareillement était réalisé sur l’âge, le sexe et les antécédents de coronaropathie et de maladie athéromateuse périphérique. Le second critère de jugement secondaire était la survenue de MACE à 30 jours (mort d’origine cardiovasculaire, hospitalisation pour insuffisance cardiaque, arythmie ventriculaire et infarctus du myocarde).
Au total, 835 patients ont été inclus, dont 777 ayant bénéficié du dosage de troponinémie à J3, parmi ces patients 40 avait une troponinémie augmentée. Chez 18 d’entre eux il a été identifié d’autres causes que le vaccin pouvant expliquer l’élévation de troponinémie, et chez les 22 restants aucune autre cause que le vaccin était mis en cause. La population étudiée était majoritairement composée de femmes (69 %), la moyenne d’âge était de 37 ans et les patients recevaient très majoritairement leur 3ème dose 92 %. Moins de 2 % d’entre eux avaient des antécédents cardiovasculaires.
Les résultats de l’étude retrouvent que 2,8 % de la population vaccinée présentait des lésions myocardiques, 3,7 % chez les femmes et 0,8 % chez les hommes (Figure).
Cela est une surprise à la vue de la population décrite dans les myocardites hospitalisées. Lors de la comparaison de la population avec des lésions myocardiques versus la population sans lésion myocardique, le seul facteur de risque retrouvé était le sexe féminin (p=0.03).
La comparaison avec le groupe contrôle ne retrouvait pas de différence significative en dehors des antécédents d’infarctus du myocarde et de maladie athéromateuse périphérique.
De plus on peut noter, que la troponinémie dans la population vaccinée semble plus élevée que dans le groupe contrôle sans que le test statistique n’ait été réalisé. L’incidence des lésions myocardiques est de 2,8 % soit 800 fois supérieure à l’incidence habituelle des myocardites. Elle survient majoritairement chez les femmes contrairement aux myocardites virales habituelles.
Aucun MACE n’a été rapporté dans la population étudiée à 30 jours, néanmoins du fait de la réalisation de doses répétées, il est intéressant de se demander si cela ne pourrait pas entrainer des séquelles à long terme (insuffisance cardiaque, arythmie). Pour cela un essai randomisé avec un suivi au long cours serait nécessaire.
Les limites évoquées sont la réalisation de la troponinémie à J3, avec une élévation peu importante de la troponinémie, avec possiblement une sous-estimation de l’incidence des lésions précoces à J1 potentiellement déjà normalisées à J3. De plus, devant la faible atteinte myocardique celle-ci ne parait pas possible à détecter en IRM cardiaque. Une autre limite serait l’absence d’inclusion de patient de moins de 18 ans dans la population étudiée.