Notre confrère et ami, Ferdinand Ayité a été interpellé jeudi par la brigade de recherche et d’investigation (BIR), sur plainte semble-t-il, de certaines personnes haut perchées de l’appareil directionnel de notre pays. Son binôme, Joël Egah avec qui il a co-animé l’émission incriminée, serait lui- aussi convoqué pour aujourd’hui vendredi dans le même bureau où le premier a été gardé la veille.
Visiblement, l’autorité a piqué une vive colère, suite à des propos tenus par le confrère qui seraient jugés diffamatoires et qui, selon nos informations de coulisses, pourraient lui coûter cher, comme il se dit communément dans notre pays.
Je voudrais en cet instant précis, en ma qualité de citoyen et de surcroît journaliste, évoquer certains principes cardinaux qui gouvernent l’organisation d’une société d’hommes et de femmes civilisés.
En effet, en tant que société, rassemblant des humains, le besoin d’organisation en vue de notre évolution a poussé notre espèce à mettre sur pied une série de règles et de principes qui doivent gouverner notre Vivre Ensemble. Parmi ces principes, figure en bonne place, celui du choix d’un dirigeant qui a la lourde responsabilité de porter sur ses épaules, le destin de tout le monde à la fois.
Ainsi, lorsque tout va bien au sein de la société, son nom est porté haut et fort partout où besoin est, même si le fait que les choses aillent totalement bien ne soient pas forcément de son apanage, ou particulièrement son oeuvre à lui.
Dans ces circonstances heureuses, il jouit évidemment des appréciations venant de toutes parts et chantant en chœur sa louange et sa gloire. Personne, évidemment ne lui en voudra de bénéficier des dithyrambes que les citoyens chantent en son honneur sous le prétexte qu’il n’en aurait pas le mérite. La dessus nous sommes tous d’accord.
En revanche, lorsque les choses vont mal, la tendance humaine est encore la même, jeter absolument l’anathème sur lui, même s’il n’en est vraiment pour rien ou si sa responsabilité n’est pas totalement avérée.
Mais malheureusement, dans ce deuxième cas d’espèce, les citoyens ou ceux qui prennent le risque d’incriminer le dirigeant, doivent naturellement s’attendre à son courroux. Ceci est purement humain, mais pas forcément juste.
Car autant il est prêt ou se dispose à jouir des éloges parfois immérités, autant, il devrait, par souci de responsabilité et de sacrifice, accepter que les citoyens lui attribuent certaines causes de leur déboires même s’il n’en est pas totalement responsable.
Le point de vue exprimé par notre confrère Ferdinand Ayité sur certaines actions qui se mènent au sommet de notre pays, devrait être perçu sous cet prisme et au cas où il n’est pas avéré, que l’on le rappelle gentiment à la raison par une approche plus humaine plutôt que par un recours à une procédure judiciaire qui en rajoute à la confusion déjà forte dans le pays en ce qui concerne les positions qu’ont pris l’habitude d’adopter nos dirigeants.
Il est clair que dans la situation actuelle, quelle que soit la pertinence des raisons que vont évoquer les plaignants, ils auront du mal à convaincre, sans doute parce que le niveau de dégradation du tissu social et des principes régissant le Vivre Ensemble est très poussé.
Dans un tel contexte, quelle est l’attitude idéale à adopter lorsque l’on se trouve dans cette position délicate de dirigeant où les citoyens râlent au quotidien à cause de leurs conditions précaires de vie?
S’élever au dessus de la mêlée, non pas par aveu de faiblesse, mais de sagesse et de clairvoyance, pour rétablir les faits par un discours persuasif, correcteur et rectificatif des jugements erronés qui seraient portés contre l’autorité.
Autrement, en s’appuyant sur une justice dont l’image est déjà suffisamment écornée par ses propres errements pour se donner raison, le citoyen tout comme l’observateur extérieur, auront le net sentiment qu’il cherche plutôt à vaincre en se servant de ses laquais plutôt que d’œuvrer pour convaincre. Alors de deux choses l’une. Que choisissent finalement les autorités plaignantes?
En rajouter au mal déjà persistant dans le pays, ou opter pour le sacrifice qui les élève et donne la preuve qu’elles sont bien conscientes qu’ayant accepté d’occuper des postes de responsabilité au sein du gouvernail du pays, elles doivent, par pur sens de responsabilité, se considérer comme des dépotoirs sur lesquels, les citoyens vont jeter aussi bien de bonnes choses que de mauvaises?
De la suite de cette procédure contre les confrères, dépendra la réponse que nous serons amenés à donner à cette interrogation.
Luc Abaki