La Fédération du Mali : L’éphémère flamme du panafricanisme en Afrique de l’Ouest

À la charnière des années 1959-1960, l’Afrique de l’Ouest vibrait d’un souffle nouveau. Deux jeunes nations, le Sénégal et le Soudan français (futur Mali), décidèrent de s’unir pour donner naissance à la Fédération du Mali, symbole d’un idéal panafricain : bâtir une Afrique forte, indépendante et solidaire face aux séquelles du colonialisme.

Le 20 juin 1960, la Fédération proclama son indépendance. Modibo Keita en devint président, tandis que Léopold Sédar Senghor prit la tête de l’Assemblée fédérale. Mais derrière cette image d’unité, les divergences politiques et les ambitions nationales s’exacerbaient.

  • Deux visions opposées : Keita défendait une union centralisée et socialiste, convaincu qu’une structure forte était indispensable pour garantir souveraineté et développement. Senghor, diplomate pragmatique et francophile, prônait une approche plus modérée, valorisant l’autonomie des États et une coopération équilibrée avec la France.
  • L’ombre coloniale persistante : Bien que Paris ait reconnu officiellement la Fédération, elle œuvra en coulisses pour en limiter l’influence. Les pressions françaises poussèrent le Dahomey et la Haute-Volta à se retirer du projet, fragilisant l’unité dès sa naissance. La présence militaire française et la dépendance économique accentuaient encore cette tutelle.
  • La crise militaire : Les tensions culminèrent lorsqu’un ordre de mobilisation donné par le commandant malien Soumaré fut interprété à Dakar comme une menace directe. L’arrestation de Soumaré par les forces sénégalaises marqua le point de rupture.

En septembre 1960, le Sénégal se retira de la Fédération, scellant la fin d’une expérience politique aussi ambitieuse qu’éphémère.

La Fédération du Mali demeure un jalon historique : elle incarne à la fois l’élan panafricain et les obstacles majeurs rencontrés par les jeunes États africains — rivalités internes, pressions extérieures et complexité de la construction nationale.

Plus de soixante ans après, cette tentative avortée nous interpelle encore : l’Afrique aurait-elle été plus forte unie ? Et quelles leçons tirer de cet échec pour les projets actuels d’intégration régionale, de la CEDEAO à l’Union africaine ?

Komla AKPANRI
Komla AKPANRI

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