La prouesse s’est déroulée à Lyon en septembre dernier. Une greffe de larynx a permis à une patiente de 49 ans de prononcer quelques mots, avec une voix faible pour le moment.
Nous en étions restés en 2010, avec la greffe de larynx réalisée sur une Californienne de 52 ans. Depuis, plusieurs autres greffes de cet organe ont eu lieu dans le monde, jusqu’à parvenir pour la première fois en France en septembre dernier. Karine, 49 ans, vient de bénéficier de cette prouesse réalisée à Lyon. « Cela me fait bizarre de parler à nouveau, mes filles ne m’avaient jamais entendue », confie-t-elle. La patiente respirait par une trachéotomie depuis une vingtaine d’années, sans possibilité de parler. Elle avait connu des complications liées à son intubation en réanimation après un arrêt cardiaque en 1996. Son larynx a commencé à se rétrécir (sténose du larynx) pour finir par totalement se détériorer au fil dans années.
La complexité du larynx
L’opération a été menée par douze chirurgiens et a duré 27 heures en comptant le prélèvement et la transplantation. Ce n’était pas une mince affaire car le larynx est un organe particulièrement délicat à prélever et à greffer, comme l’explique à Franceinfo le professeur Philippe Céruse, chef du service ORL et chirurgie cervico-faciale de l’hôpital de la Croix-Rousse. « Le larynx est fait de cartilages, de muscles, de muqueuses, d’artères et donc c’est composite, il y a plusieurs tissus au sein de ce greffon. C’est compliqué parce que c’est un organe qui est complexe, de par sa vascularisation, son innervation et son rôle. Les éléments qu’on raccorde sont de l’ordre de quelques millimètres, donc il y a un temps de microchirurgie qui est important et qui est long. C’est pour cela qu’on a été nombreux sur cette intervention. »
Si la non-fonctionnalité du larynx handicape fortement le patient, ce type de transplantation n’est pas prioritaire car la vie de la personne n’est pas en danger. Il s’agit donc seulement de la quatrième greffe de larynx recensée dans le monde, après deux aux États-Unis et une en Pologne en 2015.
De la patience et de la rééducation
Après son opération, Karine a été en soins intensifs pendant une semaine, puis 45 jours en hospitalisation « classique ». Son traitement immunosuppresseur a été renforcé à la suite d’un début de rejet, mais elle a pu rentrer chez elle dans le sud de la France le 26 octobre dernier. Il faudra attendre une année complète pour s’assurer de la réussite définitive de sa transplantation.
Pour l’heure, la patiente a retrouvé les odeurs et a pu prononcer quelques mots avec une voix « rocailleuse ». Elle suit des séances de rééducation des cordes vocales, de la déglutition et de la respiration avec une orthophoniste pour retrouver toutes ses capacités. « Le larynx, ne sert pas uniquement à parler, mais aussi à manger, à respirer. Et donc il faut qu’on arrive à retrouver ces trois fonctions et c’est ça qui en fait toute la complexité, a précisé le professeur Céruse. Cela va lui demander du temps pour que le larynx se réinnerve, que les nerfs repoussent, et puis de rééducation, parce qu’elle a oublié comment il fallait faire pour parler. »
Si tout se passe comme espéré, Karine devrait pouvoir retrouver l’usage de la parole avec une voix normale d’ici quelques mois.
Futura-Sciences