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Les stocks européens de gaz, à leur niveau le plus bas depuis des années, pourraient être épuisés d’ici deux mois, sur fond de vague de froid, suggère Bloomberg. Alors qu’ils l’étaient bien avant l’hiver, l’Europe, plongée dans une crise énergétique, n’a pas accordé suffisamment d’attention à l’approvisionnement en gaz.
Face à plusieurs défis, dont la flambée des prix sur le marché gazier et la transition énergétique, le Vieux Continent n’a pas déployé assez d’efforts pour assurer son approvisionnement stable en gaz pour l’hiver, et risque de voir ses stocks épuisés dans les deux prochains mois, rapporte Bloomberg.
« Avec les deux mois les plus froids de l’hiver encore à venir, la crainte est que l’Europe puisse manquer de gaz », tranche l’agence.
Les stocks européens d’or bleu sont actuellement à leur plus bas niveau en comparaison avec les mêmes périodes des années précédentes, remplis à 56,24%, selon les données de Gaz Infrastructure Europe (GIE), alors que la saison hivernale bat son plein. Il s’agit de 15% de moins que la moyenne décennale, précise Bloomberg.
« Au cours de ces dernières années, depuis le début des enregistrements, nous n’avons pas eu des niveaux de stockage comparables à ce moment », a indiqué Sebastian Bleschke, directeur de l’INES, l’association des exploitants allemands de systèmes de stockage de gaz et d’hydrogène, cité par Bloomberg.
En effet, Gazprom a annoncé que les pays européens avaient déjà épuisé plus de 41% des stocks accumulés cette année, « des taux de prélèvement records dans toute l’Histoire de l’Europe ».
Pas de préparatifs faits à l’avance
De nombreux spécialistes avaient tiré la sonnette d’alarme bien avant l’arrivée du froid. En octobre dernier, Amos Hochstein, conseiller américain pour la sécurité énergétique mondiale, a fait part de ses craintes concernant la dégradation de la situation en Europe au point qu’elle pourrait mettre en danger la vie des gens.
À l’époque, les stocks étaient remplis à 77%, volume jugé suffisant pour passer l’hiver par la commissaire européenne à l’Énergie Kadri Simson et par l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER). Une affirmation débattue par M.Hochstein qui a à son tour pointé le risque d’une crise de disponibilité des ressources en Europe.
Cette « crise énergétique a frappé le bloc lorsque la sécurité d’approvisionnement n’était pas au menu des décideurs politiques de l’UE », conclut Maximo Miccinilli, responsable de l’énergie et du climat chez les consultants FleishmanHillard EU, cité par Bloomberg.
L’instabilité du marché gazier et les problèmes d’approvisionnement sont conditionnés par l’accumulation de facteurs négatifs.
À part l’hiver précédent particulièrement long, ayant contribué à l’épuisement des stocks, c’est la transition énergétique qui a grippé les rouages. L’Europe ferme des centrales électriques au charbon, augmentant sa dépendance aux énergies renouvelables, alors que l’éolien et le solaire sont parfois instables comme sources énergétiques. De plus, la forte demande des pays asiatiques pour le GNL contribue au maintien des prix élevés.
Gaz russe bloqué par l’Europe
Enfin, la question de la mise en service du Nord Stream 2 et celle des livraisons de gaz russe par Gazprom sont également à l’ordre du jour. Principal fournisseur d’or bleu en Europe, Moscou fait face à de nombreuses accusations de ne pas fournir davantage de gaz, ce qu’il nie toujours en expliquant ne pas pouvoir livrer en dehors des obligations contractuelles.
Bien que la Russie soit prête à augmenter ses livraisons en cas de signature de contrats supplémentaires, l’Europe les refuse, en privilégiant acheter du gaz au marché spot et payer plus cher.
Sans autorisation du Nord Stream 2, rien ne changerait la donne, avance Bloomberg. Les commerçants se préparent déjà au pire, les prix du gaz livré du printemps à 2023 ayant augmenté d’environ 40% au cours du mois dernier. Certains spécialistes, auxquels l’agence se réfère, supposent que la crise pourrait durer jusqu’en 2025, lorsque la prochaine vague de projets de GNL aux États-Unis commencera à approvisionner le marché mondial.
« Il est difficile de voir comment un niveau décent de stockage de gaz peut être atteint sans exportations russes supplémentaires via le Nord Stream 2 ou les conduites existantes », a déclaré Massimo Di-Odoardo, vice-président de la recherche sur le gaz et le GNL chez Wood Mackenzie. Et d’ajouter que « 2022 sera une année volatile pour les prix du gaz en Europe ».
De nombreux spécialistes et personnalités politiques ont déjà mis en avant les éventuelles conséquences négatives du report du lancement du gazoduc russe, prêt à l’exploitation, et surtout de son arrêt. Parmi les déclarations les plus récentes c’est Klaus-Dieter Maubach, directeur du groupe énergétique international Uniper, qui a suggéré que l’arrêt du projet Nord Stream 2 « serait un risque économique ».
Son lancement n’est pas attendu avant le deuxième semestre 2022, a avancé l’Agence fédérale des réseaux, chargée de la délivrance des autorisations.
Source : sputnik news