Centrafrique : Arrestation du ministre Hassan Bouba, pour qui roule la CPS?


L’arrestation spectaculaire du ministre de l’élevage et de la santé animale Hassan Bouba, encore en fonction par la CPS le 19 novembre 2021 a défrayé la chronique durant toute la semaine dernière jusqu’à ce qu’intervienne sa mise en liberté le 26 novembre dernier. Mais la question que les Centrafricains se posent est celle de savoir si cette arrestation est opportune dans le contexte où le pays se prépare à aller au dialogue républicain voulu par toutes les forces vives de la nation ? Son arrestation par la CPS, son inculpation et sa détention ont été faites dans les règles de l’art ?


Il est un secret de polichinelle que dès son accession à la magistrature suprême de l’Etat, le Président Faustin-Archange Touadera avait, conformément à la politique de la main tendue qui lui est chère, opté pour le dialogue avec les groupes armés afin de ramener la paix définitivement dans le pays. Sachant pertinemment le poids de la tâche qu’il a héritée, Faustin-Archange Touadera avait dans un premier temps, l’obligation de pacifier le pays qui était mis en coupe réglée par les groupes armés avant d’amorcer la reconstruction du pays.
C’est dans cette optique qu’il s’était démené comme un beau diable pour rassembler tous les groupes armés pour un dialogue qui s’était soldé par la signature de l’Accord Politique de Paix et de la Réconciliation en Centrafrique (APPR-RCA) sous l’égide de la Communauté internationale. Cet accord salué par les Centrafricains a valu son pesant d’or jusqu’à la tenue des nouvelles élections dans le délai constitutionnel et saluée par les Centrafricains et la Communauté internationale.


Malheureusement certaines forces centrifuges qui veulent voir toujours le sang coulé en Centrafrique se sont regroupées une nouvelle fois pour créer une coalition rebelle qu’elles ont abusivement baptisée Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) en vue de saper les efforts de la reconstruction nationale consentis par les autorités dirigeantes.


Malgré l’avènement de la fameuse CPC impulsée par ces entrepreneurs de guerre, certains groupes armés qui ont opté pour la paix, sont restés dans l’APPR. C’est ainsi que certains membres de gouvernement issus de ces groupes armés sont restés encore dans le gouvernement. C’est le cas du ministre de l’élevage et de la santé animale, Hassan Bouba, Gotran Djono Ahaba, Amza Guisimala, Gilbert Toumou Deya et Amit Idriss.


Ainsi dans l’esprit de cet APPR, ceux-là qui en sont encore fidèles doivent conduire le processus jusqu’à son terme afin de préserver la paix et la stabilité. C’est probablement à la fin du processus de l’APPR encore en vigueur qu’ils pourraient être appelés suivant les cas pour se justifier sur les crimes qu’ils auraient commis dans le cadre de la Commission Vérité Justice et Réparation (CVJR) devant la justice internationale et nationale.


Cependant l’arrestation du ministre Hassan Bouba de l’UPC paraît très paradoxale compte tenu du rôle qu’il a joué depuis la signature de l’APPR. Nul n’est sans savoir que c’’est grâce à lui qu’on a assisté au désarment volontaire de plusieurs éléments de l’UPC qui ont régné dans l’arrière-pays. Ces actions en faveur de la paix ont fragilisé énormément le seigneur Ali Darass qui n’a pratiquement plus d’éléments. C’est en artisan de paix que Hassan Bouba continue de sensibiliser ses ouailles à déposer les armes.
Au moment où nous mettons en ligne cet article, 70 éléments de l’UPC se trouvent à l’école de la Gendarmerie Nationale dans le cadre du DDR. Est-ce vraiment opportun de mettre la main ou d’appréhender le ministre pour des faits antérieur à l’APPR ?


En procédant ainsi la CPS qui est le produit d’une entente entre la Minusca et le gouvernement centrafricain est en train de remettre en cause le processus de paix en Centrafrique. L’on se demande pour qui roule réellement la CPS ? Une autre question qui taraude l’esprit des Centrafricains est de savoir comment le ministre a été libéré ?


Il y a lieu de savoir qu’après son arrestation dans son cabinet ministériel, le ministre Hassan Bouba a été gardé au camp de Roux sur la base d’une ordonnance d’incarcération provisoire qui expirait le 26 novembre à 10h.

Suivant l’ordonnance d’incarcération jointe, dépassé ce délai sa détention était devenue arbitraire. C’est ainsi que le ministre était mis en liberté le 26 novembre à 13h, trois heures (3h) de temps après l’expiration de l’ordonnance d’incarcération. Et ceci, conformément à la loi. Jusqu’au moment où nous mettons en ligne cet article, les responsables de la maison d’arrêt n’ont reçu aucun mandat pour leur permettre de maintenir Hassan Bouba en détention.
La CPS est-elle une juridiction nationale ou internationale ?


Si la CPS n’a pu obtenir l’extraction de Bouba ce jour 26 novembre pour sa première audience de comparution, c’est à cause de concours de circonstance. D’après les informations de sources concordantes, c’est parce qu’il y avait des manœuvres militaires au camp de Roux au cours desquelles il est fait interdiction à quiconque qui se présentait. Elle aurait dû attendre même lundi pour procéder à l’extraction du ministre pour son audition. Pourtant elle disposait d’un délai de 5 jours pour procéder à son audition.


Plus grave encore la CPS n’a pas procédé à l’audition du ministre Bouba comme l’exige la pratique avant de le placer sous mandat de dépôt tel que relevé dans son communiqué de presse. Avec la manière à laquelle elle a procédé, la CPS à encore une fois de plus violé la loi.
De l’avis de certains juristes, la CPS aurait dû en l’absence du ministre Bouba, décerné un mandat d’arrêt au lieu d’un mandat de dépôt. Au regard de droit, il y a clairement un vice de forme dans cette procédure contre le ministre Hassan Bouba. Il apparaît judicieux d’interpeller le ministre de la justice afin de jeter un coup d’œil sur ce qui se passe à la CPS.


S’agissant d’une juridiction nationale, est-il nécessaire de faire un communiqué faisant état de prétendue entrave de fonctionnement des activités de la Cour par les autorités du pays ? Ce qui confirme que la Cour est au service des forces occultes, disons de ceux qui ne veulent pas la paix dans ce pays. Oui nous sommes tous d’accord pour la lutte contre l’impunité mais l’on ne saurait remettre en cause l’APPR gage de la paix et de la stabilité qui nous a permis d’aller jusqu’à l’organisation des élections.


Le processus du Dialogue Républicain étant en marche, les prochaines élections municipales sont prévues pour 2022. Remettre en cause l’APPR par l’arrestation des acteurs positifs risquerait de compromettre sans doute la paix et la stabilité en RCA. Ce qui est sûr, l’heure de la justice arrivera d’un moment à l’autre.


Dans un Etat de droit, les quelques irrégularités dans cette procédure prouvent que le ministre Hassan Bouba était détenu arbitrairement. Le ministre de la justice doit avoir un regard en alerte sur le fonctionnement de toutes les juridictions en Centrafrique y compris la CPS. L’on se souvient encore d’un mandat d’amener décerné contre Bozize à l’époque de Patassé qui a eu des conséquences graves. C’est ce qui a déclenché la rébellion des libérateurs avec Bozize qui sont venus renverser le pouvoir de l’époque. D’après les observateurs de la vie politique centrafricaine, ce que la CPS est en train de faire est plus politique que juridique.


Un mandat d’amener décerné en 2020 et que l’on choisit 2021 pour mettre en application au moment où l’on s’achemine vers le Dialogue Républicain est plus risqué. C’est une manière de saper les efforts de la réconciliation en jetant de l’huile sur le feu. Voyant que son mandat s’expirera bientôt, la CPS qui n’a aucun bilan à son actif veut se réveiller de la léthargie dans laquelle elle est plongée depuis sa mise en place. Mais vouloir mettre en mal la stabilité et la quiétude pour justifier son mandat est suicidaire. A l’allure où vont les choses, l’APPR est en danger. Et il n’est pas dans l’intérêt de pays de sacrifier cet accord à cause de petits calculs politiciens. Attention, quand la politique rentre au prétoire, la justifie s’enfuie par la fenêtre.

Komla
Komla

Je me nomme AKPANRI Komla, historien de formation, arbitre fédéral. Le journalisme est une passion pour moi plus précisément le journalisme sportif puisque je suis un sportif. Ayant fait une formation en histoire, j'aborde aussi des questions politiques, sociales et culturelles

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