Le FMI estime que la multitude de projets de monnaies digitales de banque centrale est un risque. Selon ses experts, une régulation internationale est nécessaire. Cette proposition risque de ne pas trouver une grande adhésion.
Des experts du Fonds monétaire international (FMI) ont récemment défendu l’idée de créer une instance internationale de régulation des monnaies digitales de banque centrale (CBDC), apprend-on de la transcription d’un échange avec des journalistes. « Nous devons créer un système de paiement mondial qui fonctionne entre les pays et où les CBDC, les monnaies numériques de banque centrale sont interopérables entre les pays », a fait savoir Tobias Adrian, conseiller et directeur du département monnaies et marchés des capitaux au sein de l’institution.
De l’avis de cet expert, les monnaies digitales de banque centrale peuvent fonctionner ensemble, et il faudrait une coopération mondiale qui permettra de mettre en place ces systèmes de paiement. Son avis était donné alors qu’on discutait sur les nouveaux risques à prendre en compte dans la régulation du secteur monétaire.
Cette contribution intervient en droite ligne avec les préoccupations du FMI en matière de stabilité financière internationale, mais elle survient aussi alors que certains pays africains ont déjà émis leurs monnaies digitales (e-naira au Nigeria) et que d’autres ont lancé une réflexion pour en apprendre plus sur les implications d’une telle monnaie (Kenya). D’autres projets de monnaie digitale n’ont pas prospéré, comme c’est le cas en Tunisie et au Sénégal, avec la Banque régionale des marchés.
La différence entre les CBDC et les cryptomonnaies au sens strict, c’est que les premières sont garanties par un régulateur officiel, alors que les secondes sont gérées par un système virtuel de Blockchain. Mais pour de nombreux pays africains, l’adoption de monnaies digitales aurait au moins l’avantage de permettre une création et une circulation plus facile de la monnaie, accroissant l’inclusion financière, et réduisant l’exclusion monétaire.
Certains analystes de l’économie africaine, comme le statisticien camerounais Dieudonné Essomba, ont souvent pensé que l’émission de monnaies parallèles intransférables et inconvertibles serait une opportunité concrète de trouver des moyens alternatifs pour le financement des économies dont les monnaies ont une parité fixe comme le franc CFA. Cette réflexion suggère que les CBDC seraient dans ce contexte un point de départ de la binarisation des moyens de paiement dans la région, et d’une relance du financement des économies.
D’un autre côté, il n’est pas certain que des pays à faible revenu adhèrent à un système de régulation mondiale des monnaies digitales. Les mécanismes actuels sous le leadership du FMI n’ont pas toujours été à leur avantage, d’autant que leurs droits de vote au sein de l’institution sont faibles. Le mouvement des monnaies digitales est justement né d’une volonté de s’affranchir de l’exclusion monétaire qu’impose le système financier actuel à des centaines de millions de personnes.
Source: Ecofin