Depuis l’annonce d’un potentiel déploiement des mercenaires Russes du groupe Wagner, les tractations diplomatiques, de Bamako à Paris, sont à leur comble. D’un côté, la France, ancienne puissance coloniale, après 8 ans de présence militaire, semble tâtonnée dans sa stratégie de lutte contre le terrorisme au Sahel. L’épicentre de l’insécurité s’est même déplacé du centre au Sud du pays. L’attaque de camions du corridors Dakar Bamako, couloir vital pour l’économie malienne, est une illustration parfaite de la généralisation de l’insécurité sur le territoire Malien.
Face à cette menace croissante, l’appel aux mercenaires Russes de Wagner est devenu une demande populaire. Néanmoins, cette sollicitation russe n’est pas du goût de Paris qui voit sa sphère d’influence menacée. Pour celà, l’Élysée, pour tordre le bras à Bamako, en vue de le faire renoncer à Wagner, la diplomatie française fait jouer son poid diplomatique.
Dans un premier temps, l’implication de l’Union européenne est la preuve même que Paris est prêt fermer le robinet , si Bamako ne revenait sur sa décision. L’union européenne est le premier donateur du Mali, avec 1 milliards de dollars d’aide chaque année et des programmes pilotés dans le nord. Le futur déploiement de la task force Takuba confirme l’intérêt et l’implication européenne dans la crise malienne. L’organisation européenne s’est dite même prêt à coordonner ses sanctions avec la CEDEAO. Comme en Centrafrique, la France et l’union européenne ne veulent pas tomber dans une nouvelle désillusion. Tandis que l’union finançait la reconstruction de l’armée et des institutions Centrafricaines, les russes capitalisaient les géostratégiques sur le terrain.
Plus encore, l’implication du G5 SAHEL n’est pas en reste. Le jour même de la conférence sur la Libye, les présidents de Burkina Faso, du Tchad et du Niger ont été conviés à des entretiens. L’absence du président Goita est un signe que le couple Franco-malienne est sur la voie de divorce. Par ailleurs, l’implication prochaine de la diplomatie américaine sur la question Wagner n’est pas exclure. Les relations bilatérales entre les Etats Unis et la Russie ne sont pas au beau fixe. Washington met du bâton dans les roues, partout où la Russie est présente : Ukraine, Syrie, Caucase …..
L’affaire Wagner ne fait pas l’unanimité chez les acteurs maliens. Le MNLA, principal mouvement indépendantiste Touareg, a dorénavant fait savoir qu’il s’opposerait à l’arrivée des paramilitaires ; ce qui risquera de fragiliser les accords de paix.
Malgré les tractations de Paris pour isoler Bamako, la diplomatie Malienne fait actuellement preuve d’une habileté pointue.
Primo, la rencontre entre Me Abdoulaye Diop et son homologue russe à Moscou, au moment que le président Emmanuel Macron recevait ses partenaires du G5 SAHEL, est une manœuvre bien pensée et organisée par les autorités maliennes. Le coup médiatique découlant de cette rencontre a fait même éclipser celle de Macron et des alliés sahéliens. Le chef de la diplomatie Malienne est revenu à Bamako avec des promesses russes de renforcer l’armée malienne en équipements. Comme le disait Gauthier Rebynski, chroniqueur à France 24: » Pour faire trembler les chancelleries occidentales, il faut se rapprocher de Moscou »., les autorités de la transition Malienne l’ont compris. Le Mali a montré sur ce coup qu’il n’est pas nain diplomatique. Rien qu’en sollicitant Wagner, ils ont fait trembler les chancelleries occidentales.
Secundo, conscient qu’un éventuel isolement de Paris pourrait sérieusement porté un coup sévère aux efforts de lutte contre le terrorisme, le Mali, malgré les sanctions de la CEDEAO, essaye aussi de promouvoir une coopération beaucoup plus renforcée avec ses voisins sahéliens. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre le discours de choguelle Maiga , après les attentats d’Inata au Burkina.« Je voudrais vous dire que cette lutte contre le terrorisme sera gagnée par nos deux peuples et le peuple du Sahel. Cette lutte sera gagnée parce que nos peuples n’ont d’autres choix que de se mobiliser, que de soutenir nos forces de défense et de sécurité qui constituent la colonne vertébrale des Nations et de nos Etats », a rassuré Choguel Kokalla Maïga.
Le Mali et la France sont des partenaires stratégiques. Tourner le dos définitivement à la France n’est pas une bonne option. En 2013, l’intervention française a été décisive. Elle a permis d’éviter l’effondrement de l’État Malien. Aujourd’hui, la crise multidimensionnelle que traverse le Mali doit être une implication de tous y compris russes, chinois, africains, occidentaux …..Mais, il faudra de la vision et du pragmatisme à la diplomatie et au peuple malien pour ménager les intérêts des uns par rapport aux autres.
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