0076/HAAC/01-2023/pl/P
Abdelmadjid Tebboune a procédé lundi 19 novembre à un remaniement de son gouvernement promis juste après son investiture pour un second mandat présidentiel.
Tout ça pour ça, sommes-nous tentés d’écrire. C’est sans changement majeure dans la composante de l’ancienne équipe gouvernementale. Un coup à blanc, comme nous a habitués aamou Tebboune.
Nadir Larbaoui, premier ministre ayant fonctionné en mode avion car effacé, reste à son poste. Il est presque un spectre de Tebboune, une ombre qui ne gêne pas. De même pour les détenteurs des ministères régaliens qui sont élevés au rang de ministre d’Etat.
Ainsi, Ahmed Attaf, qui ne peut être crédité d’un bilan élogieux à la tête du ministère des Affaires étrangères rempile à son poste. On ne peut dire que la diplomatie algérienne a brillé sous son règne, dans le concert des nations. A part par des déclarations sonores et tonitruantes au sujet de la Palestine. Ahmed Attaf est « bombardé » du double titre de Ministre d’État et de Ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines. Un titre à rallonge, sans véritable efficience.
Élevé lui aussi au rang de Ministre d’Etat, Mohamed Arkab dirigera toujours le secteur de l’Energie, des Mines et des Énergies renouvelables.
Mais l’originalité, la seule car politiquement fort significative, est l’arrivée de Saïd Chengriha au gouvernement. Le chef d’état-major de l’Armée nationale populaire occupe désormais le poste de ministre délégué auprès du Ministre de la Défense nationale. La curiosité de l’annonce, c’est que, même s’il n’est que ministre délégué, donc de moindre importance, son nom a été placé avant les ministres d’Etat. Comprenez que c’est lui le chef.
On notera aussi, le sort malheureux réservé à l’ex-titulaire du portefeuille de ministre de l’Industrie et de la production pharmaceutique, Ali Aoun.
Son départ très attendu a des allures d’un limogeage qui ne dit pas son nom. L’ex-ministre de 79 ans paie ainsi la gestion controversée du dossier de la relance ratée de l’industrie automobile. A cela s’ajoutent les nombreux changements précipités et dans des conditions opaques opérés, il y a peu de temps, à la tête de certaines entreprises publiques de la filière sidérurgie. Mais pourquoi il est le seul à payer son échec ?
Ayant survécu à des remaniements successifs de gouvernements, Abdelhakim Belaabed fait les frais de ce remaniement. Il perd son portefeuille de Ministre de l’éducation nationale au profit de Mohamed Seghir Saâdawi, un universitaire de la wilaya de Naama, jusque-là, conseiller du président de la République chargé de l’Éducation, de l’Enseignement Supérieur, de la Formation Professionnelle et de la Culture.
Réputé proche du chef de l’Etat, Ibrahim Merrad garde son poste de Ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire.
L’autre changement qui étonne mais sans surprendre est celui opéré au niveau du secteur stratégique de la communication. Mohamed Meziane hérite du poste jusque-là occupé par Mohamed Lagab qui passait, pourtant, pour être l’un des hommes du président mais, visiblement, tombé en disgrâce.
Son acharnement à défendre avec zèle Abdelmadjid Tebboune n’a pas empêché que son action à la tête du secteur de la communication soit parasitée par des interférences venant du cercle directe de Tebboune. Kamel Sidi Saïd, conseiller du président de la République, chargé de la Direction générale de la communication à la présidence de la République, a carrément phagocyté les prérogatives ministérielle d’un Laagab passé maître dans l’art de tancer les journalistes coupables, à ses yeux, de ne pas mettre assez d’entrain patriotique à défendre le programme de Tebboune. Il est bien remercié !
Aussi, on notera une promotion dont il reste à décrypter les motivations. Il s’agit de celle de l’ex-wali d’Oran, Saïd Saïoud qui passe au statut supérieur de ministre des Transports en remplacement de Mohamed Habib Zahane, « appelé à d’autres fonctions », nous dit-on.
Du changement aussi à la tête du secteur du commerce. Mohamed Bouchari est nommé ministre du Commerce extérieur et de la Promotion des exportations. Tayeb Zitouni quant à lui reste mais occupe un nouveau département ministériel, celui du Commerce intérieur et de la Régulation du marché national. C’est là une autre curiosité. Deux ministères pour le commerce !
Ce changement plutôt technique est symptomatique d’une gestion approximative et de courte vue d’un secteur stratégique qui n’a pas manqué de produire un impact négatif sur le quotidien des algériens.
Survenu après deux mois d’attente, au bout d’un suspense qui, pour être factice, n’a nullement impressionné les Algériens, cet énième jeu de chaises musicales qui s’apparente à un simple changement de visages n’aura aucune conséquence réelle sur leur quotidien. Leur pouvoir d’achat restera plombée par des prix à la consommation qui jouent au yoyo.
Passé cet instant d’agitation politique superficielle provoquée par cet rééquilibrage au sein de l’équipe gouvernementale où les femmes occupent une portion congrue, on retombera dans la glaciation qui caractérise une scène politique qui ne fait pas place à l’expression libre de la presse et des idées. Créés pour être des leviers de la démocratie, les partis politiques sont caporalisés. Les moins malléables parmi eux sont réduits au silence.
Le Matin d’Algérie