Wagner au Mali : Et si les dirigeants de la transition malienne se trompaient lourdement ?

Confronté depuis 2013 à une insurrection djihadiste, le Mali ne cesse de s’embourber davantage dans une instabilité chronique. Malgré l’intervention française qui s’est révélée très efficace dans un premier temps avec l’opération Serval (2013-2014), le dispositif de Barkhane peine à répondre pleinement à l’éradication simple et définitive des nébuleuses terroristes. Le redéploiement du dispositif sécuritaire annoncé par le président Emmanuel Macron a poussé les autorités maliennes, sous la pression de la rue, à se tourner vers d’autres partenaires notamment le groupe Wagner, sans mener une lecture stratégique profonde de la situation.

Le discours de rupture du Dr Choguelle Maïga à la tribune des Nations-Unies a scellé en quelque sorte le début du divorce entre deux partenaires longtemps engagés dans la lutte contre le terrorisme. En qualifiant, le redéploiement de Barkhane « d’abandon en plein vol », à la veille de la mort du 52é soldat français au Sahel, le premier malien a voulu envoyé un clair aux autorités françaises sur la nécessité de la diversification des partenaires dans la lutte contre le terrorisme. Néanmoins, le groupe Wagner, un SMP russe, choisi par les autorités de Bamako est loin de faire l’unanimité au sein des chancelleries occidentales et des organisations sous régionales

Crée au lendemain de la guerre d’Ukraine, le groupe Wagner est désigné par certains comme une armée de l’ombre du Kremlin. Son efficacité ne fait aucun doute dans les différents théâtres d’opération : Lougansk, Der Ez-Zor (Syrie), Libye et Centrafrique. Nonobstant ces succès prestigieux, il n’en demeure moins que des interrogations restent en suspens.

Tout d’abord, le problème du Mali comme l’ensemble du Sahel n’est pas strictement militaire. Il nécessite une large prise en conscience des questions socio-économiques pour casser la propagation de l’extrémisme à la base : retour de l’administration, lutte contre la pauvreté et la disponibilité des services sociaux de bases. Or, les modalités du déploiement de Wagner se font sur une compensation financière équivalente de 9,15 millions d’Euro (6 milliards de Francs, selon les révélations de Reuters. Ce qui laisse penser que le SMP ne sera nullement engagé dans la prolongation des programmes sociaux financés par l’Union Européenne, si cette dernière venait à suspendre son soutien au Mali.

En outre, Contrairement aux puissances étrangères présentes sur le continent africain notamment la France, l’empire Russe n’a jamais eu de colonies en Afrique, ce que lui offre une aura auprès des populations africaines. En revanche, Cela ne veut pas dire que la Russie comprend les réalités et les dynamiques ethniques du terrain sahélien notamment au Mali dont les clivages nord/sud et musulmans/animistes restent des défis majeurs pour une stabilisation durable du pays.

Contrairement à l’armée française qui disposent une longue expérience et une connaissance fine du Sahel au cours de ses excursions coloniales, le SMP Wagner reste un néophyte. Par ailleurs, au Mozambique, les paramilitaires russes ont été accusés par des populations locales d’outrepasser les valeurs et des coutumes des habitants du Cabo Delgado.

Egalement, la question de l’appui aérien reste aussi une interrogation. En effet, le terrorisme ne peut être vaincu, sans une force aérienne efficace. Les quatre MI -117 russes reçus en grande pompe par le colonel Camara et quelques A – 29 Tucano ne suffiront à inverser la tendance, si les russes parvenaient à se déployer. « Notre présence est incompatible avec les mercenaires russes », a souligné Madame Parly, ministère des Armées françaises. Ces propos montrent que la France ne sera nullement engagée au côté du SMP russe. Les Mirages, les drones Reaper et les Rafales stationnés au Sahel ne seront pas utilisés pour appuyer quelconques forces mercenaires. Cela reviendra même à outrepasser les principes de l’armée française (respect du droit international) .Reste à savoir si l’armée russe prendra la responsabilité d’envoyer quelques aéronefs pour appuyer les FAMa, au cas où Wagner sera déployé.

En dernier lieu, le statut même du SMP russe pose problème. En décidant d’intervenir via des opérateurs privés, les décideurs russes sont aux antipodes de leurs voisins occidentaux. En effet, les leçons tirées de l’enlisement de l’union Soviétique en 1979 et les « pannes stratégiques » américaines en Irak et en Afghanistan ont servi de motifs à l’élaboration de ce nouveau modus operandi. Par contre, Il faudra dorénavant distinguer l’armée régulière russe et la SMP Wagner, même si ces derniers ont eu à collaborer dans le passé. En cas de bavures ou d’exactions, Wagner sera en mesure de nier catégoriquement les faits ou réfuter toutes ses responsabilités.

Source: geopolitico.info

Komla
Komla

Je me nomme AKPANRI Komla, historien de formation, arbitre fédéral. Le journalisme est une passion pour moi plus précisément le journalisme sportif puisque je suis un sportif. Ayant fait une formation en histoire, j'aborde aussi des questions politiques, sociales et culturelles

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